top of page

Interpol klaxonne, l’État se défile


Caricature d’un poste de douane africain où des agents dorment à leur bureau, laissant passer des voitures de luxe comme des Lamborghini sans contrôle. En arrière-plan, un cargo décharge d’autres véhicules, soulignant l’absurdité et la complicité dans le trafic de voitures volées.


Interpol est à Abidjan.


Vous avez sûrement entendu cette histoire de véhicules volés : des bolides de luxe subtilisés en Europe, qui traversent discrètement les ports d’Anvers avant de débarquer sous les tropiques, dans notre beau pays. Une odyssée digne d’un film hollywoodien, sauf que cette fois, la Côte d’Ivoire est le décor.

Mais avez-vous vraiment pris le temps de réfléchir aux implications et aux conséquences de cette affaire ?


Ces voitures volées ne sont pas tombées du ciel. Elles n’ont pas été parachutées par des trafiquants fantomatiques.

Elles sont entrées légalement, avec des papiers en règle : certificats de douane, immatriculations flambant neuves, et même des assurances. Oui, ces voitures volées étaient officiellement bénies par l’administration ivoirienne.

Alors, une question brûle les lèvres : qui a validé ces documents ?

  • Le scanner à conteneurs des douanes était-il en grève ce jour-là ?

  • Les certificats ont-ils été tamponnés à l’aveugle ?

  • Ou alors, plus probable, tout cela résulte-t-il d’une complaisance soigneusement orchestrée ?

Parce qu’entre nous, ce trafic ne prospère pas sans un soupçon d’assistance locale. Mais non, inutile de chercher des coupables parmi les douaniers, les garagistes, ou même les responsables d’immatriculations.

Ici, l’État joue les vierges effarouchées, comme s’il découvrait subitement ce trafic qu’il a lui-même permis.


La double peine pour les acheteurs : victimes expiatoires


Et maintenant, que fait-on ?

Ces voitures sont volées ? Très bien, saisissons-les !

Mais qu’en est-il de ceux qui les ont achetées ? Ces victimes ignorantes deviennent aujourd’hui des coupables désignés.

Restituer les voitures, c’est bien. Mais indemniser les victimes, c’est mieux.

Parce qu’ici, il y a un non-dit gênant : la seule raison pour laquelle ces voitures étaient "en règle", c’est que les autorités elles-mêmes ont validé leur légalité. Alors, en toute logique, c’est à l’État d’assumer ses erreurs, pas aux citoyens ! Mais non, ici, on préfère sacrifier les victimes sur l’autel de la communication internationale, juste pour montrer à Interpol qu’on fait "le ménage".


Certains diront que les acheteurs de ces bolides étaient bien heureux de pouvoir s’offrir des voitures de luxe à des prix défiant toute concurrence.

Mais soyons sérieux : qui, face à des papiers dûment tamponnés, irait penser qu’un crime international se cache sous le capot ?

Douane, immatriculation, assurances : tout est présenté avec une légitimité incontestable, comme un plat bien servi par un État qui maîtrise l’art de la mise en scène.


Et même face à des prix un peu trop alléchants, le vendeur aurait vite levé les doutes avec un argument bien huilé : "Ce sont des voitures saisies, revendues aux enchères, tout est légal."

Après tout, pourquoi ne pas le croire ?

Les documents officiels sont là pour appuyer le discours.

On oublie qu’en Côte d’Ivoire, les tampons administratifs ne sont pas un gage de rigueur, mais de complaisance. Une complaisance qui permet à l’illégalité de rouler tranquillement sur les routes ivoiriennes, légitimée par des institutions qui préfèrent lever des barrières financières plutôt que morales.


Mais le vrai scandale, ce n’est pas seulement que ces voitures aient été vendues.

C’est que le système tout entier a orchestré leur entrée sur le marché comme une transaction banale, routinière, presque normale. Aucun acheteur n’aurait pu imaginer qu’en payant des taxes et des frais administratifs, il participait – bien malgré lui – à une mascarade soigneusement organisée.

Et c’est là que réside l’hypocrisie : un État qui, après avoir offert son aval en toute connaissance de cause, se retourne contre ses propres citoyens, les accusant de naïveté ou de complaisance pour masquer sa propre incompétence.


Poser la question de la responsabilité des acheteurs, c’est détourner l’attention du vrai problème :

  1. Ce n’est pas le citoyen qui valide les importations,

  2. Ce n’est pas lui qui tamponne les certificats,

  3. Et ce n’est certainement pas lui qui laisse passer des conteneurs entiers sans se poser de questions.

Si les contrôles avaient été faits correctement, ces voitures n’auraient jamais foulé le sol ivoirien. Alors, pourquoi blâmer ceux qui se sont simplement fiés à un système censé garantir la légalité ? Parce qu’en Côte d’Ivoire, il est toujours plus facile de punir ceux qui n’ont ni pouvoir ni moyen de se défendre.


Et les véritables responsables dans tout ça ? Silence radio.

  • Les douaniers européens ? Pas un mot.

  • Les intermédiaires européens comme locaux qui ont importé et vendu ces voitures ? Intouchables.

  • Les fonctionnaires qui ont tamponné les papiers sans poser de questions ? Inexistants.

Parce qu’il faut bien comprendre : en Côte d’Ivoire, ce n’est jamais le sommet qui trinque. On préfère frapper là où c’est facile, chez ceux qui n’ont ni pouvoir, ni voix pour se défendre.

C’est une hypocrisie monumentale : punir les victimes tout en protégeant les rouages d’un système gangrené.


Et soyons clairs, ce n’est pas une affaire isolée.

Que ce soit dans le commerce, la justice ou l’administration, la règle est toujours la même : les petits paient pour les gros.

Vous achetez une voiture, vous la légalisez, vous payez vos taxes, et un beau matin, vous apprenez que votre SUV est un fruit du crime international.

Mais qui paie pour cette négligence ? Pas l’État, pas les douaniers, pas les intermédiaires. Non, c’est vous, encore et toujours.


Le rôle des voitures volées dans notre société : un symptôme d’une élite déconnectée


Ces voitures de luxe, en plus d’être le symbole d’un trafic international, sont aussi un reflet criant de notre société : elles alimentent un marché de l’élitisme, où posséder un véhicule flamboyant devient une obligation sociale pour briller.

Peu importe son origine.

Ce SUV volé, c’est le graal qui permet de circuler dans Cocody et Marcory avec la tête haute, sous le regard admiratif (et envieux) des passants.

Mais pendant ce temps, la majorité du pays continue d’attendre sous le soleil brûlant, à l’arrêt d’un gbaka bondé, ou de marcher des kilomètres parce qu’un système de transport public efficace est, lui aussi, "volé" à chaque échéance électorale.

Ces voitures de luxe sont donc bien plus que des objets. Elles sont le symptôme d’un mal plus profond : un pays où les apparences comptent plus que la justice, et où les élites s’offrent des privilèges au détriment du reste de la population.

Et maintenant ? Quelles leçons retenir ?


Cette affaire de voitures volées révèle plusieurs choses :

  1. Un échec systémique : La chaîne administrative ivoirienne, censée garantir la légalité, est non seulement poreuse mais complice.

  2. Une hypocrisie institutionnalisée : L’État préfère punir les citoyens innocents plutôt que d’assumer ses responsabilités.

  3. Un mépris des citoyens : Ces acheteurs sont abandonnés à leur sort, sans recours ni indemnisation, tout cela pour sauver les apparences.


Alors, que devons-nous faire ?

Rester passifs pendant que l’État nous klaxonne au visage ?

Accepter de payer pour les erreurs d’un système défaillant ?

Ou bien commencer à poser les vraies questions, celles qui dérangent :

  1. Pourquoi les responsables ne sont-ils pas inquiétés ?

  2. Qui dans la chaîne administrative profite de ce trafic ?

  3. Et surtout, pourquoi les citoyens paient-ils toujours l’addition ?

Parce qu’ici, même une voiture volée finit par refléter une vérité implacable : tout est négociable, tout se monnaye. Tout, sauf la justice.


En Côte d’Ivoire, les voitures volées ne sont qu’un symptôme.

Le vrai problème, c’est un système où l’impunité roule en SUV de luxe pendant que les citoyens marchent sur des routes pleines de promesses crevées.




1 Comment


Feragano
il y a un jour

Mafia savamment orchestrée, que peut faire un citoyen devant l'état en Cote d'ivoire ?

Je me demande bien si c'est pas couvrir cette mafia que depuis un certain moment l'importation de certains types de véhicules a été prohibée!

Like
bottom of page